CHAPITRE 27
LES MURÂBITS

Pendant ce temps, précisément en 786, au Maghrib, Idrîs ibn-`Abdallâh prit le pouvoir sur le Maroc. Son fils et lui éliminèrent le Khârijisme dans ses domaines et forcèrent tous les Juifs et Chrétiens berbères à embrasser l'Islam.

En 901 un propagandiste shî`ite, Abû-`Abdallâh, gagna quelques Khârijites berbères et bientôt devint le maître de tout le Maghrib. En 969, les Fâtimides conquirent et déplacèrent leur capitale à la ville de Caire nouvellement fondée. Ils y établirent la mosquée al-Azhar comme centre. A ce moment le mouvement fâtimide au Caire fut prêt à réaliser ses ambitions de capturer le reste du monde musulman mais il échoua et périclita devant les puissances naissantes.

En 984 le gouverneur du Maghrib se déclara indépendant du Caire. Cet acte attira la colère des Fâtimides. Pour réagir devant cette rébellion, le calife Fâtimide al-Mustanir envoya contre lui deux tribus guerrières arabes: les Banû-Sulaym et les Banû-Hillâl. Quelques 50.000 guerriers environ, avec leurs familles, descendirent en Tunisie et en Algérie. "Ne craignant ni le Créateur ni ses créatures, comme des sauterelles, ils envahissaient tout le pays" (Ibn-Khaldûn). Ceci conduisit à une nouvelle arabisation du Maghrib. Un autre effet était un sérieux recul du petit reste du Christianisme dans le Maghrib.

Les Fâtimides aidèrent les Berbères Zanâta à repousser les Berbères anhâja et à contrôler les routes du commerce transsaharien. En fait, les Sanhâjas souffraient plus du Ghana, qui leur avait pris Awdaghust en 990. Avec leurs dos contre l'Atlantique, les Sanhâjas voulaient se défendre mais ils manquaient d'une idéologie religieuse comme élan. Les Sanhâjas étaient musulmans mais peu instruits. Sur son chemin de retour de la Mecque, un chef Sanhâja revint avec un enseignant du Maroc. Celui-ci inspira `Abdallâh ibn-Yâsîn à lancer une organisation militaire religieuse appelée les Murâbits (ou "Almoravides", d'après l'écriture espagnole), nom qu'ils prirent à cause de la méthode de combattre en rangs rapprochés comme recommandée dans le Qur'ân (8:60; 3:200).

Tout au début de leur jihâd en 1042, d'abord les Murâbits gagnèrent le reste des Sanhâjas. En 1053 ils se dirigèrent vers le nord où ils conquirent Sijilmâsa. Ils se tournèrent l'année suivante vers le Sud et prirent Awdaghust. Les Murâbiîts s'allièrent à Takrûr et en 1056 ils combattirent ensemble contre les rebelles de Judâla. Ibn-Yâsîn mourut en 1056 durant des combats ultérieurs au Nord. Son général Abû-Bakr ibn-`Umar lui succéda. Cet homme, aidé par son député du Nord, Yûsuf ibn-Tâshfîn, fonda la ville de Marrâkish en 1069, étendit l'autorité des Murâbits sur tout le Maroc et arriva jusqu'à Alger en 1082. En 1110 toute l'Espagne musulmane était sous le contrôle des Murâbits. Le grand empire des Murâbits s'étendait du Ghana au Sud du Sahara jusqu'à Lisbonne et Saragosse au Nord.

L'autorité des Murâbits était connue par son respect à la pure loi sunnite Mâlikite, par son opposition à la tolérance qui caractérisait les Khârajites, par la poursuite littéraire et artistique de l'Espagne, et par le Sûfisme aussi populaire parmi les Marocains. Une conséquence importante résultant des Murâbits était qu'au onzième siècle la plupart des rois de la savane y compris ceux de Gao et de Kanem acceptèrent l'Islam, peut-être pour échapper à son attaque. L'introduction en Afrique occidentale d'un système militaire qui servait à la fondation des empires et à la conquête des esclaves fut une autre conséquence. On a constaté qu'après l'arrivée des Murâbits les esclaves devenaient un produit d'exportation transsaharien plus important que l'or. En outre, le commerce des esclaves ne se substitua pas entièrement à celui de l'or. En effet, avec le récent épuisement de l'or du Bambûk, le Ghana ne pouvait plus durer longtemps. Les Susus, un groupe païen de Soninke, sous la direction de Sumanguru, conquirent le Ghana et y établirent un état faible. Dans l'enntre-temps les Malinke découvrirent l'or à Bure, dans leur propre territoire. Cette région était huit fois plus productrice que Bambuk. Devant cette découverte, les Malinke se décidèrent de l'exploiter pour l'avantage de leur propre empire du Mali.

Au Maghrib, les Murâbits donnèrent priorité au mouvement des Muwahhids (ou "Almohads", d'après l'écriture espagnole), c'est-à-dire ceux qui professaient l'unité de Dieu. Après la mort du fondateur, Ibn-Tûmart, en 1130, `Abdalmu'min acheva la conquête du Maroc et de l'Algérie occidentale en 1147. Il établit sa capitale à Marrâkish. Dans la suite, il conquit l'Espagne et le Maghreb oriental, chassant les Normands de la Tunisie en 1160. La conquête Muwah-hide a marqué la disparition du vieux Christianisme indigène au Maghrib, parce que, selon les conquérants, embrasser l'Islam était une condition de vie.

L'effet et le plus important et durable des Muwahhids sur l'Islam du Maroc et, par répercussion, sur l'Afrique de l'Ouest (à partir du dix septième siècle) était leur promotion du sûfisme. Pendant que les Murâbits avaient essayé de le bannir, les Muwahhids, au contraire, respectaient l'immense popularité et l'autorité des shaykhs et des saints hommes qui étaient réputés avoir les pouvoirs charismatiques. En fait, satisfaisant à la demande populaire concernant l'expérience religieuse exprimée dans les chants, les danses et dans les prières efficaces, dans les bénédictions et amulettes, le sûfisme permettait à l'Islam de pénétrer dans les coeurs et culture du peuple, éliminant ou transformant les survivances païennes ou chrétiennes. La loi islamique continuait à dominer les madrasas de villes, mais dans la campagne les zâwiyas des sûfîs dominaient. Ceux-ci donnaient à l'Islam un rebondissement fort et populaire. Si la Reconquista avait atteint le Maghrib avant les Muwahhids, elle aurait pu réussir comme elle l'a fait en Espagne.

QUESTIONS:

  1. Décrivez la disparition du Christianisme indigène au Maghrib.
  2. Expliquez la différence que le mouvement Murâbit a créée en Afrique occidentale
  3. Expliquez l'impact indirect des Muwahhids sur l'Afrique occidentale.
Au chapître 28